La stupeur a envahi le monde judiciaire guinéen dans la matinée du vendredi 20 juin, à l’annonce de l’enlèvement de Me Mohamed Traoré, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats et figure emblématique de la défense des droits humains en Guinée.
L’avocat a été retrouvé, quelques heures plus tard, dans un état critique à Bangouyah, une localité enclavée de la préfecture de Coyah.
Selon les premiers témoignages, l’enlèvement s’est produit dans la nuit de jeudi à vendredi, au domicile du juriste à Conakry.
D’après son épouse, les ravisseurs – cagoulés, en civil, mais dont l’un portait un pantalon de type militaire – ont agi sans violence manifeste au départ.
« Ils n’ont rien emporté et n’ont pas agressé physiquement mon mari. Mais ils étaient organisés et déterminés », a-t-elle confié. Leur fille aînée, qui a tenté de s’interposer, aurait été giflée par l’un des assaillants, lequel aurait lancé : « Éloigne-toi, on ne veut faire de mal à personne. », a-t-elle expliqué.
Quelques heures plus tard, c’est Me Soufiane Kouyaté, membre du barreau et proche de la victime, qui a confirmé la découverte de Me Traoré à Bangouyah. L’avocat présentait des signes de torture et semblait avoir été menacé de mort avant d’être abandonné par ses ravisseurs. Son état de santé, jugé préoccupant, a nécessité son évacuation d’urgence vers une clinique pour y recevoir des soins intensifs.
Ce rapt survient peu de temps après le retour de Me Traoré d’un pèlerinage à La Mecque. Avocat réputé pour son franc-parler et son engagement en faveur des libertés publiques, sa disparition, puis sa réapparition dans un tel état, provoque une vive émotion au sein de la société civile.
L’affaire soulève de nombreuses interrogations dans un climat national de plus en plus marqué par des actes d’intimidation visant les voix critiques du régime. Si l’identité et les motivations des auteurs de cet enlèvement demeurent pour l’heure inconnues, plusieurs voix s’élèvent déjà pour exiger l’ouverture immédiate d’une enquête indépendante et transparente.
Car au-delà du cas de Me Traoré, cet événement met en lumière les menaces croissantes qui pèsent sur les défenseurs des droits humains en Guinée. Et dans un État de droit, l’impunité ne saurait être tolérée.
Mohamed Sylla
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