Une tragédie d’une rare violence a frappé le quartier Condéyah, à Sangoyah, dans la nuit du mercredi 30 au jeudi 31 juillet. Et pour cause !
Cinq membres d’une même famille ont péri, emportés par des inondations provoquées par de fortes pluies.
Si la météo en est le déclencheur apparent, les habitants désignent un autre responsable : la société indienne ODHAV, accusée d’avoir modifié dangereusement l’environnement urbain.
Selon les premiers constats, les eaux de ruissellement ont été considérablement amplifiées par l’obstruction d’un canal d’évacuation naturel, obstrué selon les riverains par des travaux récents réalisés dans la zone.
Sur les lieux du drame, des dizaines de fûts métalliques portant le nom de la société ODHAV ont été retrouvés dans les ruines de plusieurs habitations. Certains de ces fûts auraient été projetés par les eaux avec une telle violence qu’ils ont détruit des murs et emporté des biens, aggravant les dégâts.
« Cette société a tout bouché avec ses installations, sans se soucier de l’écoulement naturel des eaux. Nous avions alerté à plusieurs reprises, personne ne nous a écoutés ! », a déclaré, sous le sceau de l’anonymat, un habitant dont la maison a été inondée.
« Ils ont changé le cours de l’eau avec leurs tuyaux, leurs murs, et leurs travaux clandestins. Aujourd’hui, c’est nous qui enterrons nos morts », a lancé un autre résident visiblement ému.
La colère monte à Sangoyah, où les habitants dénoncent une transformation unilatérale et non concertée du système de drainage, menée selon eux par ODHAV.
Des conduites industrielles auraient été installées en amont, modifiant profondément l’écoulement des eaux pluviales et provoquant ainsi une véritable bombe hydraulique en cas de fortes pluies.
Face à l’émotion suscitée par la catastrophe, plusieurs riverains réclament la suspension immédiate des activités de la société ODHAV, ainsi que l’ouverture d’une enquête indépendante pour déterminer les responsabilités dans ce drame.
« Nous voulons que la justice fasse son travail. Ce n’est pas une simple inondation. C’est le résultat d’un mépris total pour nos vies et notre environnement (…) », a déclaré un jeune leader communautaire du quartier.
Du côté de la société mise en cause, un responsable rencontré sur place a tenté de minimiser sa responsabilité, évoquant des « aléas naturels » et affirmant que les fûts retrouvés étaient « vides » et que les activités avaient cessé depuis plusieurs semaines.
Il affirme que les installations étaient déjà présentes et que la zone est régulièrement sujette à des inondations saisonnières.
Mais ces explications ne passent pas. Les témoignages des rescapés, les images de maisons détruites, et surtout la colère des habitants qui dénoncent depuis des mois des risques liés aux travaux de la société, renforcent la suspicion d’un désastre évitable.
De nombreux observateurs pointent également du doigt le silence des autorités locales, accusées de laxisme face aux alertes répétées et de complicité passive dans cette gestion irresponsable de l’espace urbain.
La tragédie de Sangoyah met une nouvelle fois en lumière la vulnérabilité criante des infrastructures urbaines de Conakry face à une urbanisation anarchique et à l’impunité des entreprises qui agissent en dehors de tout contrôle.
Â
Boua King
Lire l’article original ici.