Un an après leur arrestation par les forces de sécurité, deux membres du Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC), Oumar Sylla alias Foniké Menguè, et Mamadou Billo Bah, demeurent portés disparus, a dénoncé mardi l’organisation Human Rights Watch (HRW), appelant les autorités militaires guinéennes à une enquête « crédible » et à leur libération immédiate ou à leur inculpation.
Les deux activistes avaient été arrêtés le 9 juillet 2024 à Conakry avec un autre militant, Mohamed Cissé, à la suite d’une opération menée par des soldats, des gendarmes et des hommes en civil. D’après des sources crédibles relayées par HRW, les trois hommes ont été frappés puis transférés vers un lieu inconnu, après un passage au quartier général de la gendarmerie et un camp militaire sur l’île de Kassa. Mohamed Cissé a été libéré le 10 juillet 2024.
« Cela fait un an qu’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah ont disparu, et les autorités guinéennes n’ont toujours pas mené d’enquête crédible », a déploré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à HRW. Elle appelle à une « enquête approfondie et indépendante » et à des poursuites contre les responsables.
Les autorités guinéennes ont affirmé avoir ouvert une enquête mais n’ont reconnu ni la détention des deux hommes, ni révélé leur sort, malgré les demandes de leurs avocats et de nombreuses ONG.
Oumar Sylla, coordinateur du FNDC, avait appelé à manifester le 11 juillet contre la fermeture des médias et la vie chère. Il avait déjà été arrêté en 2022 puis libéré en mai 2023. Mamadou Billo Bah, responsable de la communication du FNDC, avait lui aussi été détenu en 2023 pour sa participation à des manifestations. Tous deux avaient été acquittés.
Depuis le coup d’État militaire de septembre 2021, les autorités dirigées par le général Mamady Doumbouya sont accusées de réprimer systématiquement l’opposition. Les médias indépendants ont été suspendus, et plusieurs figures politiques et de la société civile ont été arrêtées ou victimes de disparitions forcées.
Le 21 juin dernier, un avocat de renom, Mohamed Traoré, a été enlevé et torturé après avoir démissionné du Conseil national de transition.
Le FNDC, dissous en 2022 par la junte, continue de dénoncer la répression des droits et libertés. « Trop c’est trop », a déclaré un membre du mouvement entré dans la clandestinité.
Les autorités ont annoncé un référendum constitutionnel pour le 21 septembre et des élections présidentielles en décembre, mais de nombreux observateurs restent sceptiques quant au respect de ce calendrier.
Selon le droit international, les disparitions forcées sont interdites et constituent des violations graves des droits humains. La Guinée n’a pas ratifié la Convention internationale sur les disparitions forcées, mais reste liée par les principes fondamentaux du droit international.
Le cas d’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah illustre le climat d’impunité et de méfiance grandissant en Guinée. À mesure que le pays s’enlise dans une transition militaire prolongée, les voix dissidentes sont réduites au silence, alimentant les inquiétudes quant à l’avenir démocratique du pays.
Mohamed Sylla
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