L’Assemblée nationale a renversé lundi le gouvernement du premier ministre François Bayrou, qui remettra mardi sa démission au président Emmanuel Macron, précipitant la France dans une nouvelle crise politique.
Un total de 364 députés ont voté contre la confiance au premier ministre (194 pour), qui avait annoncé fin août engager la responsabilité de son gouvernement sur son impopulaire projet de budget prévoyant 44 milliards d’euros d’économies pour 2026.
Tous les regards sont désormais tournés vers le chef de l’État, contraint de trouver son troisième premier ministre depuis sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale en juin 2024. Les élections qui ont suivi ont dégagé trois blocs (alliance de gauche, centre droit, extrême droite) sans majorité à l’Assemblée nationale et plongé le pays dans une instabilité chronique.
Après l’éphémère gouvernement de Michel Barnier (99 jours), le destin de celui de François Bayrou, qui lui avait succédé en décembre, était connu. Depuis plusieurs semaines, les partis d’opposition, de l’extrême droite à l’extrême gauche, avaient annoncé rapidement qu’ils voteraient non.
Se sachant condamné, François Bayrou a lancé lundi devant l’Assemblée nationale un ultime cri d’alarme sur la situation économique de la France, deuxième économie de l’UE.
Évoquant une «épreuve de vérité», il a répété que le «pronostic vital» du pays était «engagé» en raison de son «surendettement», qui atteint 114% du PIB.
«Notre pays travaille, croit s’enrichir, et tous les ans s’appauvrit un peu plus. C’est une silencieuse, souterraine, invisible et insupportable hémorragie», a-t-il dit dans un discours ponctué d’invectives lancées par les partis d’opposition.
«Vous avez le pouvoir de renverser le gouvernement, mais vous n’avez pas le pouvoir d’effacer le réel», leur a-t-il lancé, comparant «la soumission à la dette» à «la soumission par la force militaire».
Équation politique complexeÂ
Emmanuel Macron a pour l’instant écarté la possibilité d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale, réclamée à cor et à cri par l’extrême droite.
La tenue de nouvelles législatives n’est «pas une option, mais une obligation», a affirmé lundi sa cheffe de file Marine Le Pen, dont le parti (Rassemblement national) et ses alliés sont donnés en tête du premier tour avec 33% des suffrages, devant la gauche et le camp présidentiel, en cas d’élections anticipées.
Le Parti socialiste a, lui, répété ces derniers jours que la gauche, arrivée en tête aux dernières législatives, devait prendre la tête du gouvernement.
«Nous sommes prêts, qu’il vienne nous chercher», a lancé lundi le président du groupe socialiste à l’Assemblée, Boris Vallaud, à l’adresse d’Emmanuel Macron. Les socialistes ont toutefois prévenu qu’ils n’envisageaient qu’un gouvernement de gauche, sans les macronistes.
Le chef de l’État devrait plutôt tenter d’élargir son bloc central et chercher une personnalité de droite ou du centre qui serait acceptée par le Parti socialiste.
Mais la tâche s’annonce ardue face à des partis qui campent sur leurs positions. Plusieurs noms circulent, dont ceux des ministres des Armées Sébastien Lecornu, de la Justice Gérald Darmanin ou de l’Économie Éric Lombard.
Mouvements sociauxÂ
«Le problème actuel en France, c’est que chacun (des partis) a des lignes rouges (qui) rendent totalement impossible la formation d’une coalition. Il n’y a pas de coalition majoritaire qui puisse tenir durablement», estime pour l’AFP Mathieu Gallard, de l’Institut de sondage Ipsos.
Dans un contexte de défiance généralisée envers Emmanuel Macron, dont la cote de popularité est au plus bas depuis son arrivée au pouvoir en 2017 (environ 77% de mécontents selon un récent sondage), plusieurs échéances plaident pour une vacance courte.
Un mouvement «citoyen» né durant l’été sur les réseaux sociaux sous le slogan «Bloquons tout», soutenu par certains syndicats et la gauche radicale, a appelé à paralyser le pays mercredi. Mais la portée réelle de la mobilisation – qui rappelle à certains égards celui des «gilets jaunes» qui a secoué la France en 2018-2019 – reste incertaine.
L’ensemble des organisations syndicales ont par ailleurs appelé à la grève et aux manifestations le 18 septembre.
Vendredi, l’agence Fitch doit annoncer la note de la dette française, avec une possible dégradation à la clé dans le contexte d’incertitude actuel.
Avec AFP
Lire l’article original ici.