En géopolitique et en géostratégie, les États entretiennent des rapports de force symétriques ou asymétriques, réaffirmant ou affirmant leur domination (militaire, économique, technologique, industrielle, culturelle, etc.) à l’échelle internationale.
Ainsi, dans cette dynamique de conquête ou de reconquête d’un positionnement stratégique à l’échelle internationale, la question de la posture ou de la stature du chef d’État, tout en tenant compte des liens historiques et des enjeux contemporains, revêt un intérêt hautement stratégique.
C’est pourquoi, cette image, prise à l’occasion d’un tête-à-tête entre l’actuel président des États-Unis et cinq chefs d’État africains, illustre à bien des égards, la volonté manifeste du président américain d’user d’une forme d’autorité paternaliste et impérialiste vis-à-vis des chefs d’État africains.
À travers cette image, l’approche sémiotique révèle comment, à travers une simple photo, des hiérarchies implicites et des visions stéréotypées peuvent être reproduites et normalisées. Elle pose ainsi la question de la place de l’Afrique dans l’imaginaire politique occidental : partenaire ou simple faire-valoir ?
En effet, trois constats majeurs méritent d’être analysés. Premièrement, une asymétrie de pouvoir, où les invités africains sont symboliquement relégués au rang de figurants. Deuxièmement, une vision implicite de l’Afrique comme une entité unique, indistincte, et non comme un ensemble de nations avec des identités et des priorités propres.
Enfin, une instrumentalisation de la rencontre pour les besoins de la communication politique de Trump, soulignée par la présence du slogan MAGA au centre de l’image.
Le non-dit le plus frappant est que cette rencontre semble davantage servir l’image des États-Unis et de leur président que celle de ses interlocuteurs africains, qui ne bénéficient d’aucune individualisation ni d’une reconnaissance symbolique forte.
En effet, l’image est centrée sur Trump, assis derrière le bureau présidentiel, entouré des cinq présidents africains, debout. La position assise de Trump souligne sa domination symbolique en tant qu’hôte et détenteur du pouvoir, tandis que la posture debout et formelle des invités traduit le respect et la reconnaissance implicite de cette autorité.
Mieux, la disposition spatiale, les couleurs (drapeaux américains, décorations militaires, cravate rouge, chapeau « Make America Great Again ») et les symboles (bustes de Churchill et de Lincoln) renforcent un récit visuel qui glorifie l’histoire et la puissance américaines, marginalisant visuellement les invités. Ceux-ci apparaissent homogénéisés (même style vestimentaire, même posture), comme dépersonnalisés, sans qu’aucun signe ne rappelle la diversité de leurs pays respectifs.
Bref, le sous-entendu, le non-dit ou l’implicite de cette photo communique subtilement un rapport de domination, malgré une façade de cordialité diplomatique. La mise en scène met en avant la puissance des États-Unis et la personnalité de Trump, reléguant les invités africains à un rôle figuratif ou secondaire.
Le non-dit ici est la nature inégale des relations Nord-Sud, la difficulté pour les pays africains d’être considérés à égalité sur la scène internationale, et l’usage de ces rencontres comme symboles pour la politique intérieure américaine.
Aly Souleymane Camara
Chargé de cours en analyse du discours politique à l’Université Général Lansana Conté de Sonfonia-Conakry (UGLC-SC) — Enseignant-chercheur spécialisé dans l’analyse des discours publics et politiques, avec un intérêt pour la rhétorique, la communication de crise et les stratégies discursives dans l’espace médiatique et institutionnel.
Consultant en communication et management des établissements scolaires — J’accompagne les écoles et institutions éducatives dans la définition et la mise en œuvre de stratégies de communication interne et externe, ainsi que dans l’amélioration de la gouvernance et de la qualité de gestion.
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